Lundi 23 octobre 2017. Après 12 heures de négociations (et un processus législatif commencé il y a 18 mois), les 28 ministres européens du Travail et des Affaires sociales se sont accordés sur la révision de la directive de 1996 concernant les travailleurs détachés.
Bien qu’ils demeurent encore des points de divergence avec la position du Parlement européen, notamment sur la durée maximale du détachement et sur les transports routiers, il s’agit, dans tous les cas, d’une avancée importante pour une Union européenne qui entend protéger davantage ses citoyens.
La directive permet à toute entreprise de l’UE d’envoyer ses salariés dans un autre pays membre pendant une période de temps limitée (en moyenne 4 mois).
Ces travailleurs détachés (à ne pas confondre avec les expatriés, c’est-à-dire les ressortissants d’un Etat membre qui s’installent durablement dans un autre pays à la recherche d’un emploi) bénéficient des conditions de travail du pays d’accueil, mais les charges sociales restent celles du pays d’origine.
Plus précisément, les travailleurs détachés bénéficient d’un noyau dur de droits qui concerne les périodes de travail et de repos, les congés payés et les conditions de sécurite, ainsi que la parité entre hommes et femmes. Les pays d’accueil doivent payer ces travailleurs au moins au salaire minimum.
Concrètement : une entreprise polonaise qui envoie temporairement des salariés en France dans le cadre d’un contrat doit les payer au salaire français, mais s’acquitte des cotisations sociales polonaises.
Depuis l’élargissement en 2004 à des pays de l’Est aux salaires plus bas, la directive sur les travailleurs détachés est régulièrement accusée de favoriser le dumping social.
En effet, même si une entreprise paye ses employés au salaire minimal français, la différence entre le niveau de cotisations sociales en France (autour de 45 %) et celui de pays comme la Roumanie (13 %) et la Slovénie (21 %) reste très importante.
De plus, le système de travailleurs détachés alimente une série de fraudes :
La commissaire européenne au travail Marianne Thyssen avait proposé de réformer la directive en mars 2016. Après un premier refus de la part de 11 pays, principalement d’Europe centrale ou de l’Est, les discussions et tractations entre Etats membres se sont poursuivies durant plus d’un an.
Tard lundi 23 octobre, les ministres européens sont finalement parvenus à un compromis sur plusieurs points centraux :
Sur les 28 Etats membres, seuls 4 pays se sont opposés à l’accord du 23 octobre : la Pologne, la Hongrie, la Lettonie et la Lituanie. 3 se sont abstenus : le Royaume Uni, l’Irlande et la Croatie.
Maintenant les discussions vont entrer dans leur ultime phase, à laquelle participera également la Commission européenne.
En effet, les positions du Parlement européen et du Conseil de l’UE demeurent divergentes sur plusieurs points :
Cette phase de « trilogue » est appelée à démarrer très rapidement, les partisans de la révision, au sein du Parlement et du Conseil, désirant que la révision de la directive sur le détachement des travailleurs soit actée avant la fin de l’année 2017.
Qu’est-ce que la directive sur les travailleurs détachés? (Toute l’Europe)
Six questions pour comprendre la directive européenne sur les travailleurs détachés (Le Monde)
Travailleurs détachés : le Parlement européen et les gouvernements à la recherche d’un compromis (Toute l’Europe)
Travailleurs détachés : un déferlement de travailleurs low cost. Vraiment? DecodeursUE
Image à la une : Pixabay