Directive sur le droit d’auteur : le Parlement européen vote contre

Jean-Claude Juncker, Angela Merkel

Hier jeudi 5 juillet, après d’intenses débats, les eurodéputés ont rejeté le texte destiné à réformer le droit d’auteur pour l’adapter au numérique.  

Un vote serré au Parlement européen pour valider une directive très controversée. 318 voix contre, alors que 278 eurodéputés s’étaient exprimés en faveur de celle-ci, 31 abstenus.

Pourquoi l’Union européenne souhaite-t-elle moderniser le droit d’auteur ?

L’explosion du numérique et l’émergence des GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft) ont mis le droit d’auteur face à de nouveaux défis : Google doit-il payer pour afficher une photographie en miniature sur son moteur de recherche ? Un titre ou un hyperlien peuvent-ils être protégés par le droit d’auteur ?  Les questions adressées à la Cour de justice de l’Union européenne se sont multipliées pour savoir comment interpréter la directive de 2001, poussant la Commission européenne à entreprendre l’adaptation de sa législation à l’ère numérique.

En septembre 2016, la Commission dévoile ainsi une proposition de directive et la soumet au Conseil des ministres de l’UE (les négociateurs des États membres amendent le texte de la Commission jusqu’à parvenir à un accord entre les 28) et au Parlement européen : suite au rejet voté hier à Strasbourg, le texte fera désormais l’objet d’un débat, de nouveaux amendements et d’un nouveau vote pendant la prochaine session plénière, en septembre.

Quelles sont les principaux points de désaccord ?

Soutenue par les artistes et leurs représentants, ainsi que la plupart des éditeurs de presse, cette directive était la promesse de voir les géants du numérique être forcés à signer des accords de rémunération avec eux, et à filtrer (tout du moins en partie) les contenus postés sur leurs réseaux dont ils se trouveraient responsables. 

Sans action de leur part et en cas d’atteinte au droit d’auteur, les ayants droit auraient en effet pu se retourner contre ces plateformes pour contrefaçon afin d’obtenir réparation.

Face à eux, les multinationales de la Silicon Valley — qui ont financé un vaste lobbying à Strasbourg —, l’univers des start-up et plus globalement les défenseurs des libertés sur Internet s’opposaient à cette directive qui faisait planer la menace d’un filtrage généralisé des contenus, voire d’une modification profonde des systèmes de référencement des sites sur les moteurs de recherche. Elle prévoyait également la mise en place d’une rémunération des organes de presse par les agrégateurs de liens et autres moteurs de recherche, notamment dans le cadre de services d’actualités.

Vécu comme une véritable victoire pour l’industrie du numérique, ce vote fait une nouvelle fois élever la voix de ceux qui défendaient ardemment le texte : « La campagne de désinformation orchestrée par les porte-voix des GAFA constitue un problème démocratique(…) Google, Apple, Facebook, Microsoft et Amazon font du lobbying via des ONG bidons. Il est impossible d’avoir un débat à ciel ouvert avec l’un des responsables des GAFA, ils n’apparaissent jamais directement », David El Sayegh, secrétaire général de la SACEM.

 

Sources et pour plus d’information :

Droit d’auteur : pourquoi la proposition de directive européenne fait-elle débat ? (Toute l’Europe)

Directive sur le droit d’auteur : le Parlement européen vote contre (Toute l’Europe)

Créateurs et géants du Web s’affrontent autour de la réforme du droit d’auteur (CultureBox)

Réforme du droit d’auteur : la directive rejetée au Parlement européen

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