Le voyage entre mes frontières

De Roberto Meloni, volontaire SVE à Pistes Solidaires, Pau- France

De ma maison, quand il fait beau, vous pouvez voir les Pyrénées. Maintenant, ils sont déjà blanchis à la chaux et quand il fait beau, il est merveilleux de voir les rayons du soleil se briser sur la neige blanche.

Près de trois mois se sont écoulés depuis le début de mon service volontaire européen ici à Pau, dans le sud de la France. Depuis mon arrivée, je me retrouve dans une situation frontalière continue. Attention, aucune frontière représente une barrière ou une porte difficile à franchir pour passer de l’autre côté. Non, ma frontière est labile, elle bouge dans le temps, dans l’espace et dans les cultures.

Au-delà des Pyrénées, il y a l’Espagne, et la semaine dernière, ma frontière m’a amené à Donostia, le Saint-Sébastien du Pays Basque en territoire espagnol. À la mi-octobre, j’ai franchi la frontière avec l’Espagne en traversant les Pyrénées, pour retourner en France juste à temps pour le dîner.

Mais depuis que je suis arrivé ici, cette même frontière m’amène à changer quatre langues par jour pour parler à tous les gens autour de moi. Cela m’amène à essayer le canard et le foie gras, plats typiques de cette région. Mais aussi pour préparer une pizza ouune carbonara pour mes compagnons de voyage du monde entier. Cette frontière bouge tellement qu’elle fait de moi un livre de la Human Library (bibliothèque vivante), organisé pour un groupe de vingt-trois jeunes femmes et hommes français, prêts à partir pour l’Asie et l’Amérique Latine pour leur expérience de Service Civique. « Ma vie en voyage » était le livre que je leur ai raconté ; un livre qui les a amenés au Mexique, au Guatemala et au Nicaragua, mais aussi en Hollande, en Espagne et en Angleterre. Il leur a dit combien il est beau et instructif de voyager, de vivre avec d’autres peuples et d’autres cultures. Mais comme c’est difficile en même temps!

Pistes Solidaires est l’organisation où je réalise mon SVE et qui mieux qu’une organisation de promotion de la mobilité internationale et de la solidarité pourrait m’aider à traverser tant de frontières en si peu de temps? En quelques mois, j’ai rencontré des personnes d’Amérique Latine et d’Europe qui ont eu une expérience plus ou moins longue du volontariat. Et je pense que c’est beau que ces possibilités de volontariat existent. Je reconnais dans cette Europe une mère qui te donne du courage, ainsi que des possibilités concrètes.

Mais en même temps je pense à Pozzallo, ma ville dans le sud profond de la Sicile, ma ville plus au sud de Tunis, comme j’aime toujours le souligner. Jepense à tous ces jeunes qui font face à des parcours difficiles risquant même la mort. Et je me demande quand cette Europe, leur belle-mère, s’ouvrira pour leur permettre de vivre un monde différent ? Quand les projets SVE – qui sait quoi d’autre – donneront à chacun d’entre eux la possibilité de construire un monde multiculturel, où voyager est un rêve réalisable et non un danger à affronter ?

Les chemins de solidarité qui s’ouvrent grâce à un service volontaire européen sont vraiment nombreux et représentent l’Europe que nous sommes en train de construire, cet espace multiculturel de paix où les différences sont une force, où les fromages français atteindront des prix économiques dans le monde entier et la pizza aux ananas peuvent être déclarées illégales partout!

Que le voyage vers les belles frontières du monde soit ouvert à tous, tant que le mot « frontière » ne représente qu’une autre façon de nous voir différents et égaux en droits et en culture.

Et que mon voyage à moi ne s’arrête jamais…